mercredi 13 mars 2013

La guerre des mots



Avant-Propos à destination de la censure : Il s'agit ici d'une histoire bien ridicule . Y percevoir une analogie avec des événements  historiques  plus ou moins récents est possible. Y déceler une incitation à la haine ou la discrimination serait puremement grotesque.

On a un peu oublié quand a commencé cette guerre. Mais, au moment où se déroule cette histoire, elle battait son plein. 

Il y avait d'un côté un peuple de guerriers, fiers et libres, qui vivaient sans chefs, ni lois. Tous égaux, ils ne respectaient rien, ni personnes mais s'interdisaient tous jugements. Ils mettaient sur un même pied d'égalité la justice et la force, le plaisir et la vertu. Ils se faisaient appeler les « Protobilois » en raison de l’inquiétude que suscitait chacune de leurs apparitions chez leurs adversaires. 

De l’autre côté, il y avait un peuple dont le pacifisme était tant exacerbé qu’on pouvait supposer qu’il confinait à la paresse. C’était un peuple d’ordre et de sagesse, lent à la décision, avide d’équilibre et de consensus. Ce peuple n’aimait pas la guerre, mais ne savait pas faire la paix avec les Protobilois car il n’arrivait pas à trouver un compromis qui eut pu sembler durablement juste. On appelait ce peuple les « Antitobilois »

Un jour, alors que les Protobilois avaient remporté une victoire pour le moins décisive, les Antitobilois se réunirent en congrès. Après de très longues discussions, ils convinrent mollement  de porter le combat sur un autre front qui leur semblait alors plus favorable. Il s’agissait de prendre position, de creuser des tranchés, de bâtir des forts. On appellerait ça : « le grand retranchement ». Cela, pour survivre aux assauts répétés le plus longtemps possible, en attendant un jour meilleur où, un homme ou une femme providentiel viendrait renverser la tendance. Il est vrai qu’une telle guerre n’empêche pas les pertes humaines mais, aux yeux de la plupart, elle semble être la « moins pire » des solutions. 

A peine commencée, cette stratégie s’avéra être un échec. Non seulement, le rythme des pertes humaines ne faiblissait pas mais, en plus,  les Protobilois était comme galvanisés par la passivité de leur adversaire, y voyant les prémisses d’une victoire totale et définitive. 

C’est alors qu’apparue la mère de tous les vices : la discorde. S’appuyant sur le doute et le manque d’espérance d’un peuple qui se sentait défait, elle vint s’insinuer au cœur de leur conscience, de leur famille, de leurs assemblées. Au bord de l’éclatement, les Antitobilois était un peuple agonisant qui ne voyait  comme avenir que la vision d’un âge d’or passé qu’on aurait reconstruit comme on restaure un œuvre d’art dont la splendeur s’est fanée. 

Certains choisirent l’exil. D’autres décidèrent d’abandonner et de passer à l’ennemi. Mais un petit nombre continuait le combat. D’où venait leur espérance ? On ne sait pas. Mais il est manifeste que ce petit reste savait incommoder son adversaire : il menait une guerre de vendetta, clandestine et secrète, agrémentée de rares actions d’éclats. On les appelait "terroristes", ils se disaient "résistants". 

A cette époque, il était normal, pour résister à la terreur des terroristes, de terroriser les résistants à la terreur.  C’était la guerre des mots. La peur avait vaincu la raison.